L’intelligence collective : au-delà des discours
Congrès International
Nancy, 28-29 Avril 2020
➔ Santé mentale
projet de soin, diagnostic interactionnel, thérapie systémique
De l’art à l’art-thérapie en Foyer d’Action Éducative : la situation groupale au service de la reconstruction de l’être adolescent
Géraldine Canet
Art-thérapeute – Psychanalyste praticienne
Docteure en Art-thérapies, Spécialité des Sciences du Mouvement Humain, de l’Université Sorbonne
Paris Cité - Paris Descartes
« Le groupe précède le sujet du groupe », écrit R. Kaës (1976, p. 246). Considérant la situation groupale comme expérience moteur dans la construction de l’individu, je propose d’aborder dans cette communication, l’Intelligence Collective du point de vue de la psychanalyse de groupe, dans un contexte de création artistique.
Mes recherches en art-thérapies sur l’émotion esthétique, m’ont conduite à répondre à la double demande de la direction d’un foyer d’action éducative, d’accompagner un petit groupe d’adolescents à créer une fresque collective tout en leur ouvrant un espace d’expression personnelle. Âgés de 15 à 21 ans, les jeunes gens du foyer étaient pour la plupart en rupture avec leur milieu familial et porteurs d’une histoire difficile. Certains présentaient également des troubles psychiques entravant leurs capacités à créer des liens sociaux. Plus de la moitié d’entre eux étant des mineurs étrangers isolés, l’atelier d’expression artistique a eu aussi pour but de leur offrir la possibilité d’exprimer leurs émotions et leur histoire autrement qu’à travers le langage parlé, en raison, pour certains, de leur faible maîtrise de notre langue.
La recherche menée dans ce foyer d’action éducative s’est d’abord centrée sur l’articulation entre l’expression des émotions que permet la création, l’émotion esthétique observée, et les représentations du corps et des limites psychocorporelles dans les réalisations.
En m’appuyant sur le parcours de trois adolescents du groupe constitué autour du projet de fresque, je propose ainsi d’apporter un éclairage sur les processus à l’oeuvre dans la démarche thérapeutique à médiation plastique, et sur la pertinence du groupe art-thérapeutique dans l’institution éducative.
Dans ce contexte, à partir des théories psychanalytiques du groupe, nous observerons comment la situation groupale a pu constituer pour ces adolescents un appui dans leur mouvement vers une reconstruction psychique.
Références :
ANZIEU D. (1985). Le Moi-peau, Dunod, Paris, 1995/2.
KAËS R. (1976). L’appareil psychique groupal, Paris, Dunod, 2010/3.
KAËS, R. (1999). Les théories psychanalytiques de groupe, PUF, Paris, 2011/4.
LACAN, J. (1949). « Le stade du miroir comme formateur de la fonction du Je ». Dans Ecrits 1, Seuil, 1999/3.
WINNICOTT D.W. (1971). Jeu et réalité, Gallimard, Paris, 1975.
Etude des representations sociales de 700 soignants de la region grand est a l’egard des sujets viellissants porteur d’un handicap psychique : impact sur le processus de rehabilitation psychosociale
Salime Samira,
docteure en psychologie.
Directrice de thèse Martine BATT.
Laboratoire INTERPSY, groupes de recherche sur les communications.
La représentation sociale (RS) est une forme de connaissance socialement élaborée et partagée participant à la construction d’une réalité commune d’un ensemble social (Höijer, 2011). Elle structure les attitudes et les conduites et participe de la constitution de l’identité de la personne ainsi que de son insertion dans les groupes (Jodelet, 2003). La RS est composée d’un noyau central (N.C) qui est l’élément stable de la représentation (Abric, 1987). Il est constitué d’éléments fortement consensuels constituant la base commune, collectivement partagée par les individus d’un même groupe. Les éléments périphériques sont eux plus sensibles au contexte dans lequel la représentation s’opère. Ils permettent aux sujets d’un même groupe de s’approprier une partie de la RS tout en laissant une possible modulation interindividuelle. Intercalées entre les représentations collectives et les représentations individuelles, les représentations sociales ont une fonction, une fonction d’orientation des comportements, une fonction et une fonction justificative. En conséquence, elles ont un impact sur les postures professionnelles cognitive (Moscovici, 1984, cité par Doise, 1996, p.21).
Tout d’abord, la RS s’élabore dans l’action et l’interaction professionnelle, à partir du champ d’intervention des acteurs concernés (Piaser, 2000). Elle participe donc à la construction de l’identité professionnelle et elle oriente les pratiques. De même, les pratiques professionnelles et leurs évolutions ont également une influence sur la structuration de la RS (Abric, 1994). Enfin, la formation et l’exercice professionnel permet à la RS de se structurer autour d’une pensée appelée « experte » opposée à la pensée dite « profane » portée par la population générale (James, 1907). L’étude de l’impact de la RS sur les attitudes professionnelles permet une meilleure compréhension des enjeux liant les professionnels de santé et les individus accompagnés. Dans la littérature, à l’exception des travaux de BAS (2007) montrant la présence de stéréotypes et préjugés structurant la RS des acteurs de santé, très peu d’études ont évalué l’influence de la RS sur les pratiques professionnelles soignantes. Ce constat est d’autant plus marquant lorsqu’il est question des personnes vieillissantes porteuses de troubles psychiques (Bellamy, Roelandt, Caria, 2004). Ces dernières sont bien souvent victime d’un phénomène de double stigmatisation lié au vieillissement et la folie psychique (Clesse et al, 2016a).
Dans ce contexte, aucun travail d’envergure n’a été réalisé dans le but d’appréhender la RS des professionnels de santé concernant les individus âgés porteurs de trouble psychiques ainsi que son impact éventuel. Les auteurs ont donc mené une recherche à partir de 4 analyses statistiques visant à approcher le noyau central et les éléments périphériques de la RS des professionnels de santé concernant les sujets vieillissants porteurs de troubles psychiques. Les résultats permettront d’évaluer la potentielle influence de cette RS sur les modalités d’accompagnement des sujets vieillissants porteurs de troubles psychiques. A terme, ce travail a pour but de construire des méthodes et des outils nouveaux à destination des professionnels de santé.
Références :
Salime, S., Clesse, C., Batt, M. (2019). Health professional’s social representation about elderly subject with mental health disorders: a pilot study on 790 health professionals. Aging and Mental Health. [PsycINFO. SJR: Q3]. IF: 2, 95.
Dumand, I., Clesse, C., Salime, S., Lietard, F., Decker, M., Lighezzolo-Alnot, J., Batt, M. (2018). L’âge psychosocial: un outil au service d’une réduction de la stigmatisation institutionnelle des sujets âgés porteurs de trouble psychique. Gériatrie et Psychologie Neuropsychiatrique du vieillissement, 16, 4, 439-448. (IF : 0.505)
Clesse, C., Dumand, I., Prudent, C., Salime, S., Decker, M., Savini, C., Lighezzolo-Alnot, J., Batt, M. (2018). Globalisation des politiques de santé et psychiatrie française : enjeux et impacts. L'Évolution Psychiatrique, Volume 83, Issue 4, 2018, 657-670. (IF : 0.267)
Salime, S., Clesse, C., Batt, M. (2019). Cognitive remediation at the service of the change in the representation of caregivers for aging subjects with a mental disorder. Journal of Gerontology. (En revue)
Salime, S., Clesse, C., Batt, M. (2019). Process of deinstitutionalization of aging subjects with severe and disabling psychic disorders: a systematic review of the literature. Age and aging (en revue).
Salime, S., Clesse, C., Batt, M. (2019). Evaluation of psychosocial rehabilitation: a tool at the service of the level of autonomy of aging psychotic subjects. Psychiatrie française (en revue).
Le temps de la rencontre : Analyse structurelle et interdisciplinaire du champ psychopathologique.Quel « nouveau » regard pour quelles thérapies ?
René Boucher
Université Paris Descartes - Institut de Psychologie
"Toute la philosophie est comme un arbre, dont les racines font la métaphysique, le tronc est la physique, et les branches qui sortent de ce tronc sont toutes les autres sciences qui se réduisent à trois principales, à savoir la
médecine, la mécanique et la morale, j'entends la plus haute et la plus parfaite morale, qui, présupposant une entière connaissance des autres sciences, est le dernier degré de la sagesse.
Or comme ce n'est pas des racines, ni du tronc des arbres, qu'on cueille les fruits, mais seulement des extrémités de leurs branches, ainsi la principale utilité de la philosophie dépend de celles de ses parties qu'on ne peut apprendre que les dernières". (Descartes,Principes de la philosophie, Ed. Vrin, p.42.)
Aujourd'hui, l'accélération des connaissances, grâce à la technologie informatique, conduit à des fruits tellement lourds que les branches sont au bord d'une cassure qui conduirait immanquablement à une rupture de liens privilégiant l'hégémonie d'un système de pensée au détriment de l'interdisciplinarité et de l'intelligence collective.
A l'heure où les équations d'Einstein et de Bohr permettent à tout citoyen même le plus démuni de jouir de sa tablette magique, de parcourir des milliers de kilomètre en 3 CLICS, de consulter des mémoires collectives « comme si t'y étais », où espace et temps deviennent de plus en plus élastiques, la psychologie se rationalise et ses racines philosophiques s'estompent comme autant de chemins neuro-philosophiques abandonnés.
Dans le domaine qui nous occupe, celui de la psychologie de service public en Hôtpital de Jour pour Enfants, il s'agira de montrer comment la notion de structure peut à la fois définir le rapport du sujet au monde, et organiser le champ psychopathologique, avant que l'approche statistique du DSM 4,5,6...1984 ne réduise à néant toute compréhension clinique.
A quelles conditions éthiques, la méthodologie en psychologie (qui ne peut se passer aujourd'hui d'un caractère scientifique), peut-elle se protéger de l'instrumentalisation idéologique ? Le modèle chinois de « la note ou crédit
social » nous montre l'exemple à ne pas suivre.
Pour cela nous montreront comment, à la lumière du « spectre autistique » le débat sur la question psycho-diagnostique est obligé de croiser le regard de la psychanalyse, du behaviorisme et de la neuro-cognition.
Ce croisement interdisciplinaire non seulement permet de choisir en connaissance de cause « les bonnes pratiques », et en théorie, aboutit à la possibilité d'une vision structurelle globale de toutes les branches de la connaissance pouvant réconcilier les sciences humaines et les sciences exactes.
Freud, Lacan, Einstein, Spinoza, Bergson et Edgar Morin seront nos compagnons et nos guides dans ce chemin de réflexion « complexe » afin de mettre à la portée de tout citoyen les questions fondamentales souvent réservées dans les médias à des « experts » douteux et intéressés .
L'enjeu de l'interdisciplinarité et de l'intelligence collective passe par une vulgarisation éclairée sans laquelle une vision globale serait impossible.
Références :
Bergson Henry, L'évolution créatrice, La Collection prix Nobel de Littérature, 1962, Paris.
Morin Edgar, Introduction à la pensée complexe, Points, 2005, Paris.
Hochmann Jacques, Histoire de l'autisme, Odile Jacob, 2009, Paris.
Jean Staune, Explorateurs de l'invisible : Une plongée au coeur des plus grands mystères de l'univers et de nous-mêmes (Français) Poche – 27 mars 2018
Michel Desmurget, La fabrique du crétin digital : Les dangers des écrans pour nos enfants, août 2019